Démarche
Il a été difficile pour moi de déposer cette séquence au lendemain de la décision prise par le ministre de l’Éducation Nationale de limiter l’hommage à notre collègue professeur d’histoire et de géographie, assassiné le 16 octobre 2020 par un islamiste attaquant par la même la laïcité, à une minute de silence et à une lecture partielle d’une lettre envoyée aux instituteurs par Jean Jaurès.
Cette décision a été perçue par beaucoup d’enseignants comme une solution de repli voire de reculade au lendemain d’un nouvel attentat qui a endeuillé la ville de Nice, la ville où j’exerce, trois victimes, des personnes assassinées dans l’enceinte d’une cathédrale vouée au culte chrétien.
Or depuis plus de dix jours à la suite de la cérémonie d’hommage national depuis la cour à la Sorbonne, lieu historique de l’enseignement universitaire français, présidé par le chef de l’État, auquel a participé une délégation des membres de notre association accompagnés par Déborah Caquet notre présidente, il a été décidé qu’un hommage se poursuivrait dans nos établissements scolaires le lundi 2 novembre, le premier jour de la rentrée des vacances d’automne, selon les modalités connues. Il s’agissait de consacrer deux heures pour se concerter en début de matinée entre les collègues et nos chefs/cheffes d’établissements respectifs puis à partir de 10h faire rentrer les élèves pour expliquer l’hommage consacré à ce professeur assassiné parce qu’il avait décidé d’apprendre à ses élèves à devenir citoyens. Ensuite de lire la lettre adressée aux instituteurs et institutrices par Jean Jaurès puis rappeler les fondamentaux de notre démocratie, la laïcité.
Le ministère a annoncé hier, en fin d’après-midi, que l’hommage à Samuel Paty, lundi 2 novembre, ne pourrait avoir lieu. Tous les temps d’échanges prévus entre adultes sont annulés. Seule la minute de silence est maintenue sans que celle-ci puisse être préparée avec les élèves. Cette décision d’annulation fait mal. Notre collègue a été assassiné, décapité, parce qu’il exerçait son métier. Samuel Paty a payé de sa vie son engagement professionnel pour des principes qui nous réunissent toutes et tous. Ce temps d’explication était nécessaire pour expliquer à nos élèves : pourquoi l’école doit être un lieu sanctuarisé à protéger ?
Proposition de mise en œuvre
Cette séquence a été réfléchie avant la décision annoncée par notre ministre de l’Éducation nationale de limiter l’hommage à notre collègue à une minute et d’aborder en moins d’une heure l’explication d’une lettre écrite en 1888 dans un autre contexte celui de la IIIème République menacée par une grave crise politique, le boulangisme, et au moment où les lois scolaires sont justes votées, le point final étant la laïcisation du personnel des écoles primaires publiques (loi Goblet du 30 octobre 1886). Certes le contexte du rappel devant nos élèves de la sortie du champ de l’action politique de l’instruction religieuse qui fut une longue bataille et une conquête républicaine est nécessaire mais le discours de Jean Jaurès s’inscrivait dans le cadre de la consolidation de l’idée républicaine face aux anti républicains. Aujourd’hui le contexte est autre, c’est l’école républicaine qui est visée, le principal vecteur de notre démocratie, « la fabrique des citoyens de demain »Cyrille Bret, Géopoliticien, Sciences Po – USPC, « Terroriser l’école, c’est attaquer la Fabrique du citoyen de demain », 23 octobre 2020, publie dans The Conversation..
Le texte proposé n’a aucune prétention, il est le résultat de ma réflexion personnelle, une séquence destinée à mon public de lycéens, des élèves de seconde, qui n’ont pas forcément tous assimilés les notions de liberté de conscience et parfois enfermés dans des préjugés que seule l’école peut les aider à s’émanciper.
La question est de se poser comment on en est arrivé là, comment se fait-il que des valeurs a priori universelles et intangibles soient contestées ? Comment se fait-il qu’un idéal, la laïcité, ne soit plus signifiant ? Pourquoi la laïcité est-elle rejetée par une minorité ?
Fichiers
On peut proposer à nos élèves de lycée les questions suivantes qui ont été le fil conducteur de cette proposition :
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