Au sein du thème 2 de géographie de Terminale Tronc Commun, il est possible de réaliser une étude de cas sur la Russie, pays  dans la mondialisation. Le choix de cette étude de cas peut s’avérer judicieux pour évoquer ainsi, avec des élèves qui n’ont pas choisi la spécialité HGGSP, les conséquences du conflit russo-ukrainien déclenché depuis février 2022.

C’est l’objet de cette activité qui s’appuie sur les documents du manuel Hachette Terminale édition 2020, mais aussi sur des documents permettant de réfléchir aux conséquences de l’insertion dans la mondialisation de la Russie en lien avec la guerre menée en Ukraine.

Avant de présenter aux élèves les documents, il paraît indispensable de rappeler quelques éléments historiques sur la Russie afin de montrer que l’insertion dans la mondialisation de cet État, né de la dislocation de l’URSS, s’est faite de manière récente et sous l’influence du modèle occidental.

 

Les documents choisis sont les suivants :

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Document 1 : carte  1 page 124

Document 2 : Pôles et périphéries de la croissance économique russe

Moscou et Saint-Pétersbourg cumulent à elles deux près de 14% de la population totale, avec respectivement 13 et 5 millions d’habitants (sur les 144 millions d’habitants que compte la Russie). Et si 15 villes de Russie dépassent le million d’habitants, 5 seulement sont dans la partie dite asiatique du pays, c’est-à-dire à l’est de l’Oural. Moscou enregistre à elle seule 20% du produit national brut (PNB), soit cinq fois plus que la région des Khantys-Mansis [oblast de Tioumen], où se concentrent les industries d’extraction de matières premières, et que Saint-Pétersbourg, régions respectivement deuxième et troisième dans le classement du PNB. […] Si l’on oppose bien souvent une Russie asiatique à une Russie européenne, les inégalités sont fortes au sein même de ces deux ensembles. Ainsi dans la région de Tver, limitrophe de l’oblast de Moscou, les revenus en ville sont près de deux fois plus élevés que dans certaines zones rurales […], qui cumulent une faible desserte routière et ferroviaire, une population en décroissance et un secteur industriel à bout de souffle

                Source : « La Russie, une puissance en renouveau », Kevin Limonier et Vladimir Pawlotsky,  La Documentation photographique, n°8126, nov.-déc. 2018, p. 26.

Document 3 : 3 page 125

Document 4 : 4 page 125

Document 5 : L’importance de l’exportation de gaz pour la Russie.

Trois gazoducs russes sont entrés, ou vont entrer, en fonction en 2019 et 2020 : Nord Stream 2, pour les livraisons de gaz en direction de l’Europe occidentale, Turkish Stream, en direction de la Turquie, Force de Sibérie, en direction de la Chine. (…) En augmentant ses capacités d’exportation vers l’Europe et en les diversifiant en direction de la Chine, Gazprom, le premier producteur et exportateur mondial de gaz naturel, défend ses intérêts économiques mais promeut aussi les intérêts stratégiques du Kremlin. Le pays est plus que jamais dépendant des énergies fossiles, qui représentent 65 % de ses exportations, tandis que près de la moitié des recettes du budget de l’Etat proviennent du gaz et du pétrole. La Chine est le premier importateur mondial de gaz. Selon l’Agence internationale de l’énergie, en 2024, le pays devrait engloutir 40 % de la demande mondiale. D’ici à 2040, sa consommation augmentera de 150 %, selon les projections de la China National Petroleum Corporation (CNPC).

                Source : « Comment la Russie asseoit sa puissance sur les gazoducs », Le Courrier international, 23 décembre 2019.

Document 6 : Les sanctions contre la Russie et leurs conséquences

Le cas à la fois le plus emblématique et le plus complexe concerne le gaz dont les réseaux de transports sont majoritairement tournés vers l’ouest du pays. Les mégas contrats gaziers passés avec la Chine tout comme le lancement du chantier de la nouvelle route de la soie ont été initiés au tournant des années 2010. Simultanément l’intégration économique engagée au sein de la zone économique eurasienne entre la Russie, le Belarus, le Kirghizstan, l’Arménie et le Kazakhstan se renforce (…). Pour Moscou, la question porte dès lors moins sur la capacité à trouver des partenaires commerciaux que sur le coût de la réorientation économique des flux commerciaux et financiers. Russification, et étatisation de l’économie, voilà de quoi les sanctions économiques internationales sont le nom, en 2022.

                Source : Caroline Dufy, « La Guerre économique ou l’économie politique des sanctions à l’heure de la mondialisation. Le cas de la Russie contemporaine », avril 2022, site de SciencesPo.

QUESTIONS

  1. Documents 1 et 5 : Quels sont les facteurs d’intégration à la mondialisation pour l’Etat russe ? Comment peut-on appeler ce type de pays ? Pourquoi ?
  2. Documents 4 et 6 : Quels sont les principaux partenaires commerciaux de la Russie ? Quels changements se dessinent toutefois ? Pour quelles raisons ?
  3. Documents 1, 2 et 3 : A l’échelle nationale, montrez l’inégale intégration du territoire russe à la mondialisation.
  4. Documents 4, 5 et 6 : Les sanctions prises contre la Russie à la suite de l’invasion de l’Ukraine et la réduction des exportations de gaz russe vers l’UE, à partir de février 2022, sont-elles de nature à remettre en cause l’intégration de cet Etat dans la mondialisation ? Justifiez.

PISTES DE CORRECTION

  1. Le principal facteur d’intégration à la mondialisation reste l’exportation d’hydrocarbures, principalement le gaz dont les gisements sont particulièrement importants sur le territoire (Sibérie occidentale, Sibérie orientale et Sud du territoire) que dans les ZEE (mer de Barents, dans l’Océan Pacifique), au Sud-Est de la Russie. Mais, il y a aussi d’autres facteurs d’intégration à la mondialisation qui sont les présences de métropoles, de sièges de FTN, d’équipements de transport permettant de relier les différentes parties du pays et jouant le rôle d’interface avec l’international, et de technopôles permettant de développer l’innovation. La diversification progressive de l’économie russe ainsi que l’importance de ses ressources en fait donc un pays émergent : un pays qui ne fait pas partie des grands centres d’impulsion mondiaux, mais dont le PIB et l’IDH croissent et se rapprochent de ceux de ces centres d’impulsion. C’est une puissance qui se réaffirme.
  1. Les partenaires commerciaux de la Russie en 2016 sont principalement l’Union européenne (près de la moitié de ses exportations et 40% de ses importations) mais aussi la Chine (environ 20% des importations russes). Le texte publié à la suite de l’invasion ukrainienne signale toutefois une orientation des échanges russes avec le monde manifeste, qui a débuté dès 2014 et s’est accélérée : la Chine devient un partenaire majeur, la Russie et ses exportations de gaz s’intégrant à la nouvelle route de la soie initiée par la Chine à partir de 2013. La Russie a aussi renforcé ses relations commerciales avec la zone eurasiatique (correspondant le plus souvent aux anciennes républiques soviétiques caucasiennes (Arménie par exemple) ou asiatiques (Kirghizstan, Kazakhstan). On assiste donc à de nouvelles dynamiques concernant l’intégration russe dans la mondialisation : une diversification des partenaires commerciaux et une réorientation des échanges vers des espaces plus proches et surtout liés par l’histoire à la Russie.

  2. Le pays est inégalement intégré dans la mondialisation, les flux d’échanges mondiaux. L’Ouest est urbanisé et industrialisé, il est le plus intégré. Car, on y trouve une métropole au rayonnement international (Moscou) et des métropoles régionales aux activités diversifiées : Saint-Pétersbourg, l’ancienne capitale des tsars sur la Baltique, Volgograd au Sud-Ouest, Iekaterinbourg au pied de l’Oural et Novossibirsk dans le centre du pays, au sud de la Sibérie. Dans ces métropoles, on y trouve un quartier d’affaires, des sièges sociaux de FTN (Gazprom à Saint-Petersbourg), des centres scientifiques (centres de recherche), surtout à Moscou et des équipements de communication (aéroports, ports qui jouent le rôle d’interface). Le reste du territoire se divise en périphérie intégrée ou périphérie en marge/marginale. Ce sont des territoires avec peu de métropoles, éloignés des axes de communication importants du pays. Dans la périphérie intégrée (partie ouest du pays, Oural et Sibérie occidentale, ainsi que la bande méridionale du pays) on trouve des gisements d’hydrocarbures (gaz naturel) et des ports qui jouent le rôle d’interface (près de la mer noire et Vladivostok). La périphérie marginalisée la moins peuplée et la plus pauvre correspond à la partie orientale du partie : Sibérie centrale et orientale. Quelques gisements s’y trouvent néanmoins. Ces ressources sont à la fois un atout et une faiblesse : elles pourraient déboucher sur une économie de rente, une  économie faiblement diversifiée qui se contente des bénéfices de l’exploitation des ressources et expose la Russie aux relations avec les Etats partenaires.

  3. L’invasion en Ukraine pourrait compliquer l’intégration de la Russie dans la mondialisation, car l’UE et les Etats-Unis étaient avant l’invasion deux partenaires économiques majeurs de la Russie (la moitié de ses exportations, 45% de ses importations). Cependant, les documents 5 et 5 permettent de nuancer ce point de vue, car avant le conflit, la Russie a réorienté ses exportations de gaz vers d’autres partenaires que les pays occidentaux, notamment vers la Turquie et la Chine. Cette réorientation s’est faite pour défendre « les intérêts stratégiques du Kremlin » (document 5). Le document 6 note également que ce n’est pas vraiment le fait de diversifier et éventuellement changer ses partenaires commerciaux qui est problématique pour la Russie. Ce sont surtout les coûts qu’elle devra supporter pour « réorienter ses flux commerciaux et financiers »,  vers d’autres partenaires avec lesquels elle n’est pas en conflit ouvert qui pourrait poser problème. Les équipements nécessaires aux échanges matériels (gazoducs, oléoducs, axes ferroviaires, ports…) voire immatériels (câbles, serveurs…) représentent des sommes considérables mais sont des vecteurs indispensables à une économie mondialisée. Pour cela, le texte rappelle que c’est l’Etat russe qui aujourd’hui reprend le contrôle de l’économie, avec ses sociétés comme Gazprom. Le modèle occidental, reposant sur une mondialisation principalement organisée par des acteurs privés, qui avait permis l’intégration de la Russie à la mondialisation après l’effondrement de l’URSS, est ainsi rejeté (« russification et étatisation de l’économie »).