La série Promenades d’architecte met en images la rencontre d’un architecte urbaniste et d’une ville dont il a une approche personnelle, pour y avoir mené un projet. À travers un parcours qu’il a fixé, il analyse les axes géographiques de cette ville et son évolution historique : crayon en main, nous suivons des plans d’urbanisme dont le tracé met en lumière des mutations sociales et de nombreuses influences artistiques résultant de ses évolutions. Car comprendre une cité, c’est aussi observer la poussée démographique et l’arrivée de populations venues d’ailleurs, c’est accepter et souhaiter une certaine forme de mixité sociale

Ce film nous convie à une promenade, en compagnie de l’architecte Henri Gaudin, à travers Venise, où nous découvrons les multiples facettes de la ville, festive sous le soleil, mélancolique sous le brouillard, lumineuse dans la nuit. Le documentaire offre de multiples prises de vues concernant la Venise historique, une ville au passé millénaire, des images splendides où se lisent les multiples influences, la place Saint-Marc où rayonne la basilique aux accents byzantins. Nous suivons le long du grand canal l’histoire de ces palais construits dès le XIIe siècle qui rivalisent de beauté et d’élégance. Et puis au détour d’un pont, apparaît une église médiévale ou style Renaissance. Les moindres détails sont traqués : contours des fenêtres avec arc en accolade, colonnes qui donnent leur fluidité aux monuments, multiples statuettes et coupoles d’influence orientale qui semblent rejoindre les sommets.
Enfin, partout la présence de l’eau, un élément majeur, structurant la cité qui s’y miroite à toutes les heures du jour. À travers gondoles et bateaux, la promenade suit les tourbillons du grand canal et les lenteurs des eaux des petits canaux qui parcourent la ville aux multiples ponts de pierres et de fer parmi lesquels le pont des Soupirs et le Rialto.

Pistes à suivre
[Histoire, 2de : «Sociétés et cultures urbaines du XIe au XIIIe siècle»]

Venise, lieu des échanges économiques et culturels
Avant l’exploitation du film, expliquer les liens économiques qui unissent au XIIe siècle la ville de Venise à l’Empire byzantin. Cette dernière reçoit le monopole commercial sur la mer Méditerranée par l’Empire, affaibli par les conquêtes turques, qui lui demande en échange d’assurer sa protection. Venise crée un comptoir maritime à Constantinople. Souligner que ce privilège enrichit Venise et ses habitants ; ce qui explique son embellissement architectural financé par le doge et les patriciens de la ville.

• Décrire les premières images du film sur les palais construits par les patriciens de la ville au bord du grand canal. Les façades s’élèvent sur plusieurs étages. L’influence byzantine se remarque par la présence de colonnes, de fenêtres trilobées. Ils furent tous construits selon les même règles. Dégager les aspects fonctionnels de ces demeures. Ces palais possèdent deux entrées ; l’une donnant sur l’eau, s’ouvrant par de grandes portes où pouvaient accoster navires et gondoles qui déchargeaient leurs marchandises dans les vastes entrepôts ; l’autre entrée, côté terre, conduit vers une cour intérieure. Le style vénéto-byzantin s’est épanoui autour du Rialto, le noyau commercial originel (6e min) : ce pont était le seul à relier les deux rives du grand canal. D’abord en bois, il fut remplacé par un pont en pierre, au XVIe siècle.

• Relever les détails qui révèlent le syncrétisme culturel, ici, architectural. Les coupoles, de style byzantin, allient les matériaux vénitiens aux formes orientales. Les fenêtres possèdent des arcs en accolades. La basilique Saint-Marc offre aussi un bel exemple de syncrétisme. Le documentaire en propose plusieurs panoramas (9e min). Construite au Xe siècle, elle fut embellie tout au long du Moyen Âge. Repérer les coupoles byzantines et mettre en contradiction avec la structure demeurée gothique. Montrer en parallèle une représentation d’une mosaïque du Christ Pantocrator, visible à l’intérieur de l’édifice (voir « Pour en savoir plus »). Ainsi l’influence de Sainte Sophie de Constantinople est ici remarquable.

Venise à la Renaissance
[Histoire, 2de : «L’élargissement du monde XVe-XVIe siècle»]

• Le palais des Doges peut servir de trait d’union entre les deux périodes. Construit au XIIe siècle comme un hymne architectural à la gloire du Sérénissime Sebastiano Ziani, il fut remodelé à la Renaissance. Le gothique se remarque par la volonté d’imitation des formes naturelles, dans l’exécution des détails ornementaux, notamment de la végétation. La façade qui donne sur le Rio Palazzo est de style Renaissance, mais elle n’est pas montrée dans le film. Le mythique pont des Soupirs est montré à la 16e minute, il relie le Palais des Doges à la prison.

• Étudier les nombreuses vues de la place Saint Marc (9e min). Il s’agit des Procuraties Vecchies qui font face à la basilique. Ces dernières logeaient les neufs procurateurs qui occupaient les plus hautes magistratures après le doge. À la suite d’un incendie, un nouveau bâtiment fut conçu par Mauro Codusi, au XVIe siècle. Expliquer aux élèves les influences gréco-latines, caractéristiques de la Renaissance. Faire référence, à ce propos, à la découverte et à la traduction du traité d’architecture de Vitruve repris en partie par Palladio, architecte italien du XVIe siècle qui a travaillé à Venise. Ainsi, il est possible, à partir des explications précédentes et de l’étude de ce monument, de montrer ce qu’est l’ordonnancement des ordres : le bâtiment possède trois étages : le premier est constitué à partir de l’ordre dorique, le premier et le plus simple des trois ordres d’architecture grecque, caractérisé par un chapiteau rectangulaire ; le second est d’ordre ionique dont le chapiteau est orné de deux volutes latérales (supposé représenter la chevelure féminine) ; le dernier, d’ordre corinthien, se caractérise par un chapiteau orné de deux rangs de feuilles d’acanthe entre lesquelles s’élèvent deux volutes. Souligner également que cet édifice montre plus de sobriété que dans l’art gothique, les décorations étant moins nombreuses, et qu’il est également caractérisé par les nombreuses ouvertures, typiques de la période.
L’étude des différents ordres peut être menée également à partir de l’église des Jésuites, visible à la 18e min.

Pour en savoir plus
LUTZ Paul, Charmes de Venise, Solar, coll. « Tourisme », 1996. Un livre qui offre des photos très belles sur la ville, ses palais, ses canaux.

ROMANELLI Giandomenico, L’Art de Venise (2 vol.), Places des Victoires, 2003. Un livre d’architecture qui traite de toutes les périodes.

Christine Maillard, professeur d’histoire et de géographie